Synopsis : Parfois, et c’est heureux, l’actualité du cinéma réside dans la sortie en salles d’une poignée d’oeuvre inédites, réalisées voici plusieurs décennies. La dictature du présent cède alors la place à la vérité de l’art. C’est le destin des courts-métrages inclassables de l’Arménien Artavazd (c’est-à-dire Arthur) Pelechian. Ce camarade (en section mise en scène) de Tarkovski au VGIK, l’école de cinéma de Moscou, reste pour l’heure peu connu en Occident, malgré quelques fervents admirateurs français (dont Daney dans les années quatre-vingt, avant une rétrospective au Jeu de Paume dans les années quatre-vingt-dix).

Des trois films proposés aujourd’hui, le plus extraordinaire est le premier, Nous (1969), considéré à juste titre par son auteur comme son premier essai digne d’être pris en compte, même si sa filmographie commence en fait dès le début des années soixante. Nous est indescriptible. C’est pour le spectateur une expérience décisive, comme il y en a peu. Cinéma sonore, et non parlant (quasi absente, la parole n’y est que rumeur), qui propose une alternative inédite au cinéma parlant, cinéma qui se pose en fils unique du cinéma muet.

texte de Philippe Roger pour Revue des cultures contemporaines